CRITIQUE// L’histoire de la Princesse de Montpensier au TOP de Boulogne

“ Les mots dans toute leur beauté et leur subtilité 

« Pendant que la guerre civile déchirait la France sous le règne de Charles IX, l’amour ne laissait pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d’en causer beaucoup dans son empire. » Voilà les premiers mots du récit, qui pourraient suffire à évoquer le charme de ce spectacle tout en sobriété et en finesse.

Héroïne de Mme de La Fayette, la Princesse de Montpensier est aimée de quatre hommes. Mais dans la mise en scène de Jacques Vincey, seules deux personnes se trouvent sur scène : soutenue par la harpiste Constance Luzatti, qui interpète de nombreux morceaux du XVIIème siècle, la comédienne Marie-Armelle Deguy récite l’histoire d’une voix mélodieuse et expressive, joignant bien souvent le geste à la parole. Cette économie concentre l’attention du spectateur sur l’efficacité d’une histoire et sur la façon dont elle est racontée par la voix, la musique ou les éléments de scène. Simple et judicieusement pensé, le décor conforte cet objectif. Par leur déplacement, des paravents noirs et mobiles traduisent à eux seuls le changement d’espace qui affecte l’histoire : Paris, Champigny ou le front des combats d’une France déchirée par la guerre civile. De façon plus subtile, ils permettent aussi le passage d’un lieu de sociabilité et de représentation (le bal) à un lieu plus propice au repli sur l’intime (la chambre).

Le spectacle fonctionne à merveille. Une réussite d’abord liée à la musique dramatisante et à la sobriété des éléments scéniques : leur emploi favorise l’immersion imaginaire dans une Renaissance amoureuse, littéraire mais aussi déchirée par les guerres de religion, à l’image des  désordres de l’amour, non moins redoutables. Et puis, les mots. Dans cette mise en scène qui les met ingénieusement en valeur, ils apparaissent dans toute leur beauté et leur subtilité. Forte de tous ces partis pris scénographiques, L’histoire de la Princesse de Montpensier est un moment de théâtre des plus agréables, qui fait resurgir tout le plaisir que l’on a à se faire raconter de belles histoires.

F.A.