CRITIQUE// Jay-Jay Johanson présente son intime “Bury the Hatchet” à l’Alhambra

Le dandy crooner suédois Jay-Jay Johanson défend actuellement son nouvel album, Bury the Hatchet (29Music), ou la bande originale d’un journal intime en noir et blanc, sombre et envoûtant. Intime et pudique, il y poursuit ses expérimentations et déroule ses interrogations et sa mélancolie. Bury the Hatchet est un disque d’une élégante étrangeté.

C’est dans une ambiance souvent jazzy (l’éponyme Bury the hatchet ou From major to minor) que Jay-Jay nous plonge cette fois. Les charleston (Magnus Frykberg à la batterie) et les cuivres fatigués (Mats Äleklint) de You’ll miss me when I’m gone nous emmènent dans la cave embrumée d’une boîte de jazz d’un autre temps. Mais le Suédois dévoile aussi des décors fantomatiques et étranges, comme celui créé par le piano (Erik Jansson) de Snakes in the grass. Aidé par des sonorités électroniques qu’il dissémine discrètement tout au long des titres, le chanteur tire de sa voix et de ses textes le fil d’un film noir imaginaire. Particulièrement soignés, les arrangements sont complexes et riches sans jamais jeter d’ombre sur le timbre si particulier de Johanson et les mélodies dont il a le secret. Bury the Hatchet est un grand disque dans la discographie d’un artiste qui n’a pas fini de se renouveler – un EP (Avice to my younger self) présentant des versions alternatives et des remixes par Timmy Timid vient d’ailleurs de sortir.

Pour présenter cet album en France, Johanson a fait escale à l’Alhambra le 22 novembre dernier. S’il confiait récemment qu’il pourrait se passer de la scène mais pas du travail en studio, il semble trahi par l’agitation quasi euphorique qui l’anime entre les morceaux ou sur les instrumentaux, traînant sur scène son allure frêle et son plaisir presque juvénile. Le plaisir d’être là avec ses musiciens, ses morceaux, son public fidèle. “If I could go back in time and give my younger self some advice, never let that kid inside you die”, écrit-il dans Advice to my younger self, qu’il dit être le titre le plus intime de ce nouvel album. Ce soir-là, le public l’a vu et entendu, ce Jay-Jay éternellement jeune et vivant : il crée, expérimente et offre, tantôt dans l’intimité d’un piano-voix  (le troublant She’s mine but I’m not hers), tantôt voilé par un vocoder ou entourés de ses musiciens, une oeuvre sombre mais vivante et sincère.

Le public se souviendra probablement de ce chanteur qui, le concert à peine terminé, se jette dans la fosse sans passer par les coulisses, pour remercier les fidèles intimes et étrangers. Pas d’artifices chez Jay-Jay Johanson, ni dans ses chansons, ni sur scène.

Thomas Touzalin


De nouvelles dates en France sont prévues à partir de mars 2018.
Plus d’informations sur les concerts à venir sur sa page Facebook.
Bury the Hatchet est disponible en CD ou vinyle chez 29Music.