CRITIQUE// Jofroi enchante le Café de la danse

Celui qui fête cette année ses 50 ans de chansons se dresse là, gracieux et minéral, sur la belle scène parisienne du Café de la danse. Durant près de 2 heures, anciennes et nouvelles chansons (issues de son album Et ton rire un oiseau paru chez EPM) vont se succéder devant un public qui se sait chanceux de vivre un moment d’exception. Heureux d’habiter la même terre que ce « comédien qui fait du rêve avec du vent », comme aimait se définir l’ami Julos Beaucarne.


Le temps d’un pique-nique ou d’une recette de gaufre, à Paris ou à Cabiac sur terre, Jofroi nous invite dans son intimité, se demande « où vont les êtres humains que l’on reconduit aux frontières » et s’il neige à Montréal (en hommage à André Lavoie). Dans un tourbillon de petits riens qui font un grand tout, le plus Gardois des Belges se fait conteur entre chaque chanson. Qu’il nous parle des oiseaux (très présents dans son répertoire) ou de l’homme qui veut peindre la mer, la même malice illumine son regard. Surgit alors l’impression d’être assis autour d’un feu et d’écouter un ami, que l’on n’a pas vu depuis longtemps, nous raconter ses paysages intérieurs. C’est la vie qui bouillonne, qui nous questionne, qui nous amuse et nous chavire.

Plus que jamais engagé pour un monde plus humain, plus accueillant, il sème des petits cailloux de fraternité un peu partout. De la tendresse et de l’espoir aussi, beaucoup. Un engagement viscéral, doublé d’une invitation à la poésie, celle qui « court toute nue dans la rue », qui est à nous si on la veut. Même les animaux s’y mettent et livrent une « synfaunie » mémorable…

D’une élégance rare, les arrangements sobres et délicats de Line Adam forment un écrin parfait aux chansons du poète et à sa voix inimitable, toujours pleine et profonde. Plus touchante que jamais.

Magie des lumières, une ombre de géant se dessine derrière le chanteur, sur le mur en pierre du fond de scène. Mais déjà vient la dernière chanson. Et l’on se dit que ce moment suspendu, hors du temps, est passé beaucoup, beaucoup trop vite. Alors on « attend la fin de la nuit (…) en pensant comme toujours que jamais rien n’est fini »…

Benjamin Pechmezac


Pour plonger dans l’univers du poète, visitez le site officiel de Jofroi.